Culture et identité culturelle

Culture et identité culturelle
Certes, le Maroc a connu des changements relatifs sur le plan social, culturel, économique, etc..., maisinédits dans son Histoire.
c'est surtout dans la sphère politique que ce changement est frappant, puisque d'un Etat pré colonial makhzénien «faible» a émergé un Etat monarchique puissant et doté d'instruments et de modèles de gouvernement

Désormais, il se démarque relativement des institutions sociales traditionnelles (la Jemaâ, entre autres), en faveur d'une centralisation des
décisions et des conceptions des "projets» d'avenir. C'est en fait dans le cadre de cet Etat/Nation omnipotent et omniprésent qu'il convient en effet de situer la problématique du développement engagé et surtout de la culture et de l'identité culturelle.


L'indépendance politique étant acquise, l'Etat marocain se trouve engagé, malgré lui, dans le processus du développement, un développement
qui, se faisant dans le cadre des structures héritées de la colonisation, ne se souciait pas de la globalité et de la complexité de ce concept. L'économie a dominé pendant longtemps la conception du développement. Celui-ci était
purement et simplement réduit à la croissance, c'est-à-dire à l'accroissement du P.N.B. (Produit National Brut).


En effet, dans cette conception étroite du développement, la dimension culturelle était, jusqu'à une date récente,négligée, voire oubliée.
Ce n'est que devant les dysfonctions et les échecs sur tous les plans, quel'adoption de la perspective économiste de développement s'était avérée partielle, et que le développement est indissociable des attitudes et représentations des agents sociaux.


Ainsi, à côté de l'insistance de plusieurs auteurs sur la dimension de «l'être», du culturel dans le développement, l'Etat/Nation se dresse
comme le tuteur, le défenseur de la "culture» nationale, de «l'identité»nationale, aidé, dans tout cela, par les divers organismes internationaux(UNESCO, entre autres). C'est effectivement à une «inflation» de discours sur la culture nationale et l'identité culturelle que nous avons affaire : l'Etat marocain a consacré l'année 1986 année de la culture.


Ceci dit, on peut toutefois s'interroger sil'insistance sur le «culturel» ne constitue pas une façade pour dissimuler, au nom d'une idéologie
nationale et unanimiste, des problèmes d'ordre social et économique aigus. En mettant en avant «l'identité», la «culture nationale» ne veut-on pas
faire occulter les disparités et les inégalités dans tous les secteurs de la vie ?

Il s'agit, effectivement, d'une manipulation de la culture et de l'identité culturelle, dans la mesure où le discours sur la culture définit celle-ci par la "spécificité" de ses valeurs morales,sociales, etc..., et non pas comme étant un produit socio-historique, dont les aspects et le contenu sont sujets à évolution. C'est une définition tellement dangereuse qu'elle entraîne inéluctablement à une approche idéaliste et mythique de la culture, la considérant comme un système de règles et de conduites rigides et univoques.
Bref, arrachée au processus historique d'une société,existant sur le plan de l'universel et de l'absolu, cette conception doit être combattue pour laisser place à une autre la considérant comme l'ensemble des traits distinctifs d'un moment donné de l'histoire d'une culture et aussi comme «l'ensemble des réponses conflictuelles aux questions les plus vitales d'une société» (B.Ghalioun).
Replacée dans son processus historique, entendue comme préoccupation actuelle et réponses effectives aux divers problèmes des acteurs sociaux, la spécificité culturelle et son corollaire d'identité culturelle serait, dans ce sens, attachée à l'esprit de régénération et de rénovation, en empêchant tout immobilisme et stagnation dans le déploiement des initiatives individuelles et collectives, parce que la société serait un champ libre et libérateur.

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